Dans le dernier numéro de la revue Éléments, Alain de Benoist a porté son regard aiguisé sur mon essai « La femme est une île ». Un grand merci à lui pour la justesse de son propos.

« LE FÉMINISME CONTRE L’ÉROTISME

Le féminisme contemporain s’est engagé dans une double impasse : soit il encourage la guerre des sexes, ce qui ne fait l’affaire que des lesbiennes, soit il rejette toute distinction entre le féminin et le masculin, pour exalter le modèle neutre de l’androgyne (le ‘trangenre’). Les deux démarches sont contradictoires, mais dans les deux cas, il n’y a qu’un seul perdant: l’érotisme. – Toute forme de séduction étant perçue comme un viol. Frederika Abbate, romancière et critique d’art, décrit cette tragique dérive d’une façon vibrante de sensibilité, qui évoque le chant de Tristan à Iseult : ‘Il en est de nous deux comme du chèvrefeuille quand il s’enroule autour de la branche du coudrier’. Elle a compris, surtout, que la critique de la misandrie contemporaine (la ‘masculinité toxique’, l’homme ‘déconstruit’, c’est-à-dire castré) et le maintien de la différenciation sexuelle sont par avance voués à l’échec ‘s’ils se cantonnent à la vision conservatrice’ qui n’est que du progressisme inversé. L’enjeu réel va beaucoup plus loin : il s’agit d’admettre que nous sommes d’abord des ‘créatures corporelles’, et non des êtres ‘fluides’ et donc manipulables. Lou Andreas-Salomé et Colette, qui l’admettaient sans réserve (du biologique jusqu’au cosmique dans le cas de la première), furent de vraies femmes émancipées ; Simone de Beauvoir, qui ne l’admettait pas, n’a jamais été que l’ombre portée de Jean-Paul Sartre. L’auteur célèbre l’amour-passion, qui est une emprise réciproque, et ce que Raymond Abellio appelait la ‘femme ultime’. Son constat est radical : ‘Éros est mort, parce que l’altérité est bafouée (…) Le soi-disant amour de la diversité n’est que l’adoration du même.’ ‘Les appels à la haine sexuelle, écrit-elle encore, sont le fruit d’un mal-être très profond qui ne dit pas son nom.’ Voilà une bonne question : de quoi ces appels sont-ils le nom ? »